Pour une fois que je peux faire mon Joniwan, je ne vais pas me faire prier...

 

 

Vous vous demandez parfois si oui ou non, vous avez (ou allez) rater votre vie - et vous vous consolez peut-être en vous disant que vous gagnez beaucoup d'argent, ou que vous allez en gagner beaucoup (parce que vous savez faire des roues arrière sur votre scooter ou parce que vous êtes quatre cent millionième mondial à Fortnite), et vous en concluez que vous n'êtes pas à plaindre - mais vous trouverez bien une raison quand même, puisque vous êtes français.

Une chance pour vous, aujourd'hui, cette raison, vous n'aurez pas à la chercher bien loin : ce sera Hayato Ibuki, jeune japonais de son état (le Japon. Suivez, un peu), dont le quotidien fera passer le vôtre pour un numéro spécial louze du Figaro (quotidien... Figaro... Je le répète, suivez un peu, sinon on est pas sorti de l'onsen). Jugez plutôt :

 

- Hayato est japonais (déjà, ça pose le truc. Ça veut dire qu'il a accès à plein de mangas en V.O. et à Dead or Alive Xtreme 3).

 

- Hayato est un artiste (il a les cheveux bleus, CQFD, avec des mèches 100% bishonen pour vous rappeler que vous n'en avez plus qu'une seule sur le côté).

 

- Hayato travaille comme journaliste pour un magazine d'occultisme. Ce qui implique qu'il est payé (en théorie, parce qu'on n'en voit pas trop la couleur dans le jeu non plus) pour enquêter sur tout ce que le Japon compte de légendes urbaines et de piliers de bar sujets au delirium tremens. Je ne sais pas ce que vous, vous faites comme boulot (les roues arrière sur le scooter ne comptent pas), mais il y a peu de chances que ce soit ne serait-ce qu'à moitié aussi cool que ça (à part si vous êtes dompteur de pingouins d'eau chaude. A LA RIGUEUR).

 

- Hayato est l'Elu de Dieu. Alors je sais bien qu'avec l'avènement de l'éducation bienveillante, tout le monde est persuadé d'être dans le même cas que lui (il n'y a qu'à lire le contenu de vos comptes Twitter), sauf que là, ben c'est pour de vrai, il a des goodies divins exclusifs pour le prouver. Et c'est un peu autre chose que la Sophitia en placoplatre du futur collector Soulcalibur 6.

 

- Hayato a un Ange Gardien. Ou plutôt (et c'est important) : il a UNE ange gardienNE. Ses cheveux roses ne trompent pas, non plus que sa forte poitrine généreusement mise en avant par un bustier acheté à la Japan Expo (vraisemblablement le cosplay d'un perso de Castle Shikigami ou de Blazblue Central Fiction, je les confonds toujours). Vous, vous avez un bulldog français que vous avez appelé Son Goku. Vous pouvez pas test.

 

- Hayato a un ennemi juré. Un peu comme Charles-Kévin du service comptabilité, celui qui vous pique vos sandwichs dans le frigo du personnel, sauf que celui d'Hayato, c'est Cthulhu et qu'il veut dominer le monde. Ou le manger. Je ne sais pas trop faire la différence. Toujours est-il qu'on ne joue pas dans la même pool, là (même si le tentacule de Charles-Kévin peut être redoutable également, dans d'autres circonstances).

 

 

 

Bref, on l'aura compris : the Lost Child est bien le jeu de niche nippo-nippon que ses trailers statiques laissaient deviner, hybride entre un Visual Novel dans l'air du temps et un Dungeon-RPG de l'ère préhistorique. Sans surprise, vous y (dés)incarnez Hayato Ibuki, main character random dont la personnalité lacunaire pourrait décoller des affiches en période d'élections présidentielles, mais investi de la lourde tâche de rétablir l'harmonie entre les plans d'existence que vous explorerez (y compris à Akihabara, c'est dire si c'est pas gagné).

 

Alors que vous enquêtez sur le lieu d'une apparition funeste, une étrange jeune femme ™ vous sauve la vie ™ et vous remet une étrange valise cadenassée ™ , avant de disparaître mystérieusement ™ au coeur de la foule. A peine êtes-vous rentré au siège du Lost (le magazine pour lequel vous travaillez, entièrement imprimé sur les scripts non utilisés de la série TV), vous y êtes interpellé par une non-moins étrange jeune femme ™ , légère et court vêtue ™ qui prétend être un ange ™ et avoir été envoyée afin de vous assister ™ car vous êtes "l'élu de Dieu" ™ . Déclaration que votre éditeur et vous-même accueillez avec un flegme typiquement asiatique - parce que quand on a déjà vu Godzilla deux fois en chair et en os, plus rien ne vous étonne. 

Au moment où un Homme Poisson tente de vous dérober la précieuse valise, votre sang en active l'ouverture et vous permet d'empoigner le Gungan (pardon, le Gangour. Mais après, vous empoignez bien ce que vous voulez sur votre temps libre, ça ne nous regarde pas), sorte de mix entre le canon badass de Kuro Kaze dans Final Fantasy Unlimited et la Pokéballe moins badass de Sasha dans Pokemon - qui vous permet de capturer l'importun et de le soumettre à votre volonté.

Grand écart is over 9000.

 

Vous voilà affranchi (contrairement à lui, qui vient d'être réduit en esclavage. On dira que c'est l'échange équivalent), vous êtes fin prêt à arpenter les longs couloirs uniformes de the Lost Child à la recherche d'autres longs couloirs uniformes qui vous mèneront à d'autres longs couloirs uniformes, le tout programmé par deux stagiaires le week-end dans leur garage sur une Playstation 1. Vous la sentez, là, la poussée d'adrénaline, ou bien c'est juste de l'aérophagie ?

 

 Les deux stagiaires dans leur garage (vue d'artiste)

 

Pas de quoi se rengorger pour autant : les trailers avaient fait leur travail, le joueur savait à quoi s'attendre, il ne pourra pas dire qu'il n'était pas prévenu (même s'il le fera quand même, puisqu'il est français et qu'il a un compte Twitter. c.f. supra). Si les quelques fans d'El Shaddai (dont je suis sans réserves) attendaient le nouveau jeu de Takeyasu Sawaki comme le messie (ou comme l'Enoch, le cas échéant), ils ont dû se faire une raison dès les premiers screenshots : The Lost Child ne serait pas la suite AAA attendue de longue date, au contraire. Il se rangerait dans la catégorie des productions petit budget comme il en pullulait jadis sur la PS Vita, et il faudrait bien s'en accommoder ou passer son chemin.

 

 Shut up and take my money !

 

Pas d'éditeur illustre pour prendre la relève d'Ignition Entertainement, c'est Kadokawa Games qui s'y colle, filiale du regretté studio Kadokawa, roi de la japanimation des années 90 auquel on doit les films et OVAs les plus époustouflant de la période (Kaze no Tairiku, Five Star Stories, Arslan Senki, Silent Mobius 1 & 2, autant de petits bijoux qu'il FAUT avoir vu absolument quand on s'intéresse un tant soit peu à l'animation japonaise) : une étiquette qui, à elle seule, était gage de qualité supérieure jusqu'à ce que de sombres histoires de drogue et de blanchiment d'argent sonnent le glas de sa réputation, et mette un terme définitif à cet état de grâce. C'est dire si l'éditeur n'a ni les moyens, ni l'expérience nécessaire pour révolutionner le monde du jeu vidéo (ni l'envie, à n'en pas douter) - tout au plus se distingue-t-il ici de ses concurrents confidentiels en proposant quelques (courtes) séquences animées plutôt réussies, même si réalisées sans grande inspiration.

On est loin, très loin de l'univers halluciné d'un El Shaddai, dont on ne retrouve la patte si particulière qu'en tête de chapitres, et chez certains personnages secondaires designés par Sawaki lui-même (dans l'esprit de ses sublimes artworks effectués pour ledit El Shaddai). Après des années d'inactivité vidéoludique, l'auteur prend ici un virage à 180 degrés (contraint ou volontaire, il serait intéressant de le lui demander) : là où sa précédente création était visuellement originale, surréaliste, foisonnante, artistique pour de vrai, The Lost Child est tout le contraire : convenu, conventionnel, cliché jusqu'à la moelle, lorgnant jusqu'à loucher sur les Persona et les Megami Tensei.

Autant dire que si vous ne supportez pas les codes et archétypes propres aux mangas, les grozyeux, les "yamete senpai" et les boulettes de riz, vous serez bien inspirés de faire l'impasse, vous vous éviterez de sévères crises d'urticaire tant l'écriture oscille entre le très bon (les passages liés à El Shaddai, que l'intrigue prolonge en pointillés), le bon (ou en tout cas : dans la moyenne des productions du genre, avec tous les passages obligés qui vont avec) et le mauvais (le personnage de Lua, essentiellement, caricature de caricature dont la sailormoonerie appuyée usera davantage qu'elle ne séduira les joueurs de plus de quinze ans).

 

 I'm too old for this sh*t...

 

En contrepartie, la passion de Sawaki pour la mythologie se montre plus prégnante que jamais, avec des entrées encyclopédiques documentées et un éventail diversifié de créatures folkloriques hautes en multicouleurs, laissant la place d'honneur à l'univers Lovecraftéen et à ses excroissances visqueuses (plus que populaires, au pays du soleil levant).

 

 Oui alors par contre, c'est pas vraiment comme ça que je me les imaginais...

mais pourquoi pas, hein ? On est dans une dimension parallèle libre !

 

On regrettera alors que cette érudition ne serve que de toile de fond à l'ensemble, et que le scénario préfère réinventer les Grands Anciens à la sauce "Power Rangers", complotant en cagoules et en nippon dans le texte avec leurs voix mixées au vocoder. Paie ton angoisse indicible, on dirait du Jul. Or une telle matière première, si peu usitée chez les japonais (et tellement trop chez nous) aurait mérité un traitement plus conforme à l'esprit de l'oeuvre originale, plutôt que cette approche à rebrousse-poil et à contre-emploi (sans que cela ne soit assumé, comme ce pouvait être le cas dans un Shadow Hearts : to the New World).

 

 "Par contre Rita Repulsa a appelé, elle aura un peu de retard.

Sa soucoupe est prise dans les embouteillages".

 

Ce loupé mis à part, l'histoire se suit avec plaisir, on aime à s'immerger dans ce cadre atemporel où les légendes urbaines au goût du jour côtoient nos premières amours d'abominations jeuderolistiques. L'implication des anges déchus dans les plans des Anciens et les références à El Shaddai (dont Lost Child prend la suite, sans être une suite pour autant), rendent cet ensemble cartoonesque moins superficiel et manichéen qu'on ne pourrait le croire de prime abord. On était certes en droit d'attendre mieux de la part de Sawaki, mais on reste un gros cran au-dessus des Dungeon-RPG habituels. Ça ne vole peut-être pas haut, mais ça vole et par les temps qui courent, ce n'est déjà pas si fréquent.

 

Alors oui, ainsi qu'on l'aura suggéré plus haut, The Lost Child est le jeu du déjà-vu. Les phases de Visual Novel semblent tout droit sorties d'un Persona, les phases de Dungeon-RPG semblent directement tirées d'un jeu d'Experience Inc. (Operation Abyss, Operation Babel, Stranger of Sword City, ...), et la tonalité générale de l'intrigue semble déterminée à faire la synthèse de trente ans de poncifs japonais (personnages inclus, c'est un bundle). Loin des outrances expérimentales de son grand frère (qui lui auront brisés les ailes, et peut-être est-ce la raison première de ce revirement), The Lost Child se contente de jouer la sécurité (relative, hors Japon) en sortant ses vieux pots pour mouliner ses meilleures soupes, se contentant de réinterpréter des motifs et gimmicks ancrés depuis des lustres dans l'inconscient collectif de son coeur de cible.

Tout ce qu'il fait est convenu, oui, mais il le fait bien (et c'est sa grande force), évitant avec intelligence les principaux écueils de ce type de produits (si l'on excepte son personnage principal féminin indigent à s'en ronger les phalanges). Ainsi, les phases de visual novel ne s'éternisent pas et sont rendues relativement (c'est peu de le dire) dynamiques par la possibilité de passer d'un lieu à l'autre en fonction des destinations débloquées, ou par quelques questions à choix multiples (qui n'auront aucune incidence réelle sur le déroulé de la conversation, mais rapporteront plus ou moins de points de karma selon les situations). Au fil de vos pérégrinations, vous pourrez notamment prendre un bain dans les sources chaudes pour augmenter temporairement vos statistiques (et avec de la chance, assister à un de ces quiproquos traditionnels trololol à base madames toutes nues), racheter des potions à la boutique occulte du coin ou confier vos monstruosités apprivoisées à un moine électrique pour révéler leur potentiel caché. Normal. Japon, tout ça.

 

Le "Nyan", l'horreur psychologique ultime.

 

Si les "enquêtes" se résument tristement (mais sans surprise non plus) à questionner tous les riverains d'un secteur, le procédé n'est pas aussi fastidieux qu'on aurait pu le craindre, et plus agréable qu'on ne pouvait l'espérer (il faut dire aussi que les riverains en question sont rarement plus de cinq par quartier et qu'ils maîtrisent la technique du multiclonage - si l'on excepte les couleurs de leurs vêtements, nul ninja n'étant parfait...). Par contre, pas de miracle : il sera indispensable de maîtriser l'anglais pour ne pas perdre le fil, car le jeu n'a pas eu droit à une traduction française (et peut-on blâmer NIS, le distributeur, de ne pas avoir voulu faire les frais pour un titre qui se vendra dans les  trente exemplaires ? Même le dos de la jaquette sent la résignation à plein nez, du genre "ouais nan mais achetez-le ou pas on en a rien à foutre").

"Faites des trucs ! Gérez des machins osef ! De toute façon personne il achètera notre bidule !"

 

En contrepartie, il est possible de choisir librement entre les voix anglaises ou les voix japonaises, ce qui fera plaisir aux puristes et aux multilingues (et nous évitera une nouvelle pétition change.org)...

 

Côté Dungeon Crawler, on fait un bond de vingt ans en arrière avec des textures Microsoft Paint, une 3D Microsoft Paint 3D, un scrolling Microsoft Scrolling, des déplacements case à case Microsoft Cases, dans quatre directions (uniquement !) et à la croix directionnelle (les sticks sont désactivés, c'est le retour à l'âge de Pierre - l'apôtre, ici, c'est dans le thème).

Ceux qui ont connu la glorieuse époque de la PC Engine Duo croqueront la madeleine de Proust à pleines dents (j'ai vu tout Dragon Knight II défiler devant mes yeux, c'est dire). Les autres seront franchement dubitatifs, pour ne pas dire mortifiés devant ce Guernica en pixel art - pour peu qu'ils ne jouent pas à la version Vita (forcément mieux adaptée à son support). Pour autant, l'ensemble n'est pas désagréable à l'oeil : tout est rapide, fluide, ergonomique, les combats sont brefs, rythmés, les temps de chargement sont anecdotiques (encore heureux vu que le jeu pourrait tourner sur Gameboy), on ne perd jamais de temps dans des menus ou des sous-menus inutilement compliqués, on va a l'essentiel et la progression n'en est que plus plaisante, naturelle, addictive.

 

 

Si les afficionados de ce type de jeux risquent de pester contre la facilité des affrontements, qui leur rappellera celle de Final Fantasy VI (nous leur conseillons de se lancer directement en hard), celle-ci réjouira les joueurs curieux qui voudraient découvrir le genre sans trop de pression, ou les amateurs occasionnels qui n'ont pas forcément envie de s'infliger des heures de leveling avant de pouvoir crever un oeil à un lapin nain - aussi mutant fut-il. Pas de combats aléatoires tous les deux pas (alléluia !), pas de résistance excessive de la part des bestioles en face, juste ce qu'il faut pour progresser lentement, mais sûrement, sans frustration excessive ni sentiment de passivité pour autant. Il faudra bien ça, d'ailleurs, car les donjons sont longs, très longs, très tortueux et nécessiteront moults aller-retours à base de switch à activer pour en voir le bout (en conséquence de quoi ceux qui y joueront sur une console Nintendo seront-ils quittes pour une Switchception. Ho. Ho. Ho). Seuls les boss vous donneront des brins de ficelles à retorde et pourront provoquer quelques ragequit occasionnels, n’ayant aucun scrupule à jouer la carte du combo de groupe au mépris du fair-play le plus élémentaire. Quels margoulins, ceux-là, j'vous jure.

 

 CUILLERE (les vrais sachent).

 

Revenant aux sources du tour-par-tour, le système de combat se révèle cependant beaucoup moins austère et plus stratégique qu'il n'y paraît (pour peu que vous ne décidiez pas de rusher comme des sagouins, ce qui est possible également), émaillé qu'il est de petites subtilités modernes qui font plaisir à voir : il faudra notamment se montrer attentif à l'animosité des ennemis à l'encontre des membres de votre groupe (équipe de cinq : les deux protagonistes et trois créatures de votre choix), ou à la jauge de puissance de votre canon astral (à utiliser au bon moment, sans quoi vous risquez soit le coup d'épée dans l'eau, soit la surchauffe).

Il faudra aussi "les attraper tous", les affreux, les méchants, les baveux, et recruter tous ceux qui vous inspireront confiance (boss exceptés, ne rêvons pas) : à vous de les capturer, les purifier puis les faire monter en niveau grâce au karma accumulé lors des combats (ou durant les phases de dialogues). S'ils apprendront spontanément de nouvelles compétences au fil des affrontements (surpassant par-là même les capacités mentales d'un lycéen lambda), vous pourrez également leur en enseigner d'autres - pour peu que l'un de vos captifs possède celle que vous souhaitez leur attribuer, et que vous soyez disposés à en sacrifier une ou deux en échange.

A tout moment, lors de vos explorations ou en pleine bataille, vous aurez l'opportunité de jouer les coach de l'équipe de France et intervertir une créature active avec une consœur laissée sur le banc de touche, mais vous ne pourrez faire usage de cette capacité qu'un nombre de fois limité, au-delà duquel vous devrez quitter le donjon pour réinitialiser le compteur.

Autre petite nouveauté intéressante : les coffres obtenus sont piégés, et il faudra soit utiliser une compétence spéciale de vos créatures pour les désamorcer, soit composer avec des risques à calculer en fonction d'une jauge de danger et de déverrouillage. Autant (et plus) de petites inventions gamer-friendly qui contribuent à rendre l'expérience plus ludique...

Or le plus étonnant, c'est que ça fonctionne. Loin des systèmes inutilement tarabiscotés des RPG modernes, celui de the Lost Child fait sens, chaque mécanique a sa logique, sa raison d'être (jusqu'à l'argent que l'on ne gagne qu'en revendant certaines de nos trouvailles sur le terrain), si bien qu'on y évolue et qu'on intègre ces règles sans efforts, ni avoir à passer des heures à régler le potentiomètres du sphérier de l'alliance alchimique de la quinzième onde astrale sur la dixième médiane... et ça, contre toute attente, ça fait un bien fou (sans compter qu'au fond, ça revient au même, mais en mieux et sans esbroufe).

Les vieux de la vieille qui se demandent aujourd'hui comment ils ont un jour pu apprécier les jeux au tour-par-tour pourraient bien le redécouvrir grâce à ce titre-ci.

A chacun son temps des cerises.

 

Pas de fausse note non plus du côté de la bande originale, qui est à l'image (au son, en l'occurrence) du reste de cette production sans prétention : petit budget (les synthés en force), dénuée d'originalité mais efficace, agréable, parfaitement adaptée - tant à l'ambiance qu'au format ludique, conçue de façon à ne jamais taper sur les nerfs en dépit de sa redondance (inévitable) et des sempiternelles cassures liées aux affrontements aléatoires.

 

Pour autant, en dépit de qualités réelles (et de défauts qui ne le sont pas moins) le jeu ne s'adresse qu'à une frange de gamers marginale : les nostalgiques, les otakus, les bilingues, les fans de Sawaki, les amateurs de Dungeon-RPG peu regardant sur le challenge et les possesseurs de PS Vita, qui crèvent toujours la dalle côté catalogue de nouveautés. ça reste peu, oui, mais les vrais savent.

 

Il leur suffira d'un artwork de Lucifel, portable à la main, pour que tout soit pardonné.

 

 

Qui est au bout du fil, cette fois ?

 

Mystère.

 

Peut-être s'agit-il là d'un appel... de Cthulhu ?

 

*

 

En résumé : The Lost Child n'est pas un grand jeu, c'est certain, et n'a pas l'étoffe d'un El Shaddai - dont il est l'antithèse, ou presque - mais il possède un charme fou - que quelques élus sauront apprécier à sa juste valeur.

 

Serez-vous de ceux-ci ? 

 

Réponse dès demain dans votre boutique préférée.

 

 *

 

Addendum personnel : en ce qui me concerne, je n'ai préco The Lost Child que par principe, histoire de dire que oui, il y a des fans de Sawaki en France et que oui, ils attendent impatiemment son retour par la grande porte (ou ne serait-ce qu'une dispo d'El Shaddai en démat' sur PS4, déjà).

Ma période J-RPG étant loin derrière moi, je pensais détester cette production d'un autre âge et son esthétique d'animé numérique, au lieu de quoi ai-je été agréablement surpris.

Si certains japonismes me hérissent toujours autant le poil, j'avoue prendre plaisir à explorer ces labyrinthes monotones et à affronter ces bestioles grotesques, au point que j'ai du mal à lâcher la manette une fois lancé.

Et quelque part, je me dis qu'aussi naïf que cela paraisse, c'est là le signe d'un jeu réussi.

 

Ma trop petite collection El Shaddai...

 *

 

Quant à l'édition collector, elle s'accompagne d'un joli coffret carton (aux finitions grossières, hélas), du traditionnel artbook de la honte (couverture cartonnée, mais une trentaine de pages seulement) et d'une (très bonne) sélection CD des titres les plus emblématiques du jeu. Là encore, le minimum syndical, mais le surcoût est dérisoire, alors pourquoi se priver ?

 

 

 

 

 

The Lost Child sort le 22 juin sur Playstation, Playstation Vita et Nintendo Switch